Le soufre est connu depuis la haute Antiquité. Vers 150 av. J.-C., Caton l'Ancien recommande le soufre contre la pyrale de la vigne avec une recette qui est l'une des premières recettes d'insecticide connues en Occident. Homère le cite comme « éloignant la vermine ». Au IX siècle av. J.-C. et en -424, une tribu détruisit les murs d'une ville en brûlant un mélange de charbon, de soufre et du goudron sous ses murs. Dans le livre XXII de l’Odyssée, Ulysse revient chez lui, trouve les prétendants, les massacre puis pend douze jeunes filles qui avaient vécu avec eux. Il allume alors un grand feu où il brûle du soufre pour purifier sa maison. « Nourrice, apporte-moi du feu, du soufre salutaire, Que je soufre la salle ; puis va dire à Pénélope De venir… » Le soufre est mentionné dans la Bible à de nombreuses reprises : Yahweh fit pleuvoir sur Sodome et sur Gomorrhe du soufre et du feu (Genèse, 19, 24) ; en parlant du méchant : « du soufre sera répandu sur son lieu de résidence » (Job, 18, 15) ; Le souffle de Yahvé comme un torrent de soufre va l'embraser (Isaïe, 30, 33) ; etc. Dioscoride le décrit comme un corps jaune facilement réduit en poudre, qui brûle avec une petite flamme bleue accompagnée d'une fumée irritante utilisée par les militaires pour faire fuir l'ennemi (ce qui en fait l'une des premières « armes chimiques »). Aux environs du XI siècle, les Chinois inventèrent la poudre à canon en le mélangeant avec du salpêtre (nitrate de potassium, KNO3) et du charbon de bois. La première méthode de préparation semble dater de l'an 1044. En 1128, les militaires chinois auraient utilisé cette invention pour un bombardement. Quelques années après (1245), la poudre à canon est également découverte en Europe par Roger Bacon et Berthold Schwartz. Alchimie : Les premiers alchimistes ont donné au soufre son propre symbole alchimique qui était un triangle au-dessus d'une croix (n 4 sur la figure). Par expérimentation, ils savaient que le mercure pouvait être combiné à lui. En 1777, Antoine Lavoisier proposa à la communauté scientifique de considérer que le soufre était un élément et non pas un composé. Cependant, en 1809, Humphry Davy continuait de penser le contraire, probablement à la suite d'expériences avec du soufre impur. Au même moment, Gay Lussac et Thenard confirmait la thèse de Lavoisier. Le « foie de soufre » utilisé pour solubiliser des métaux, dont l'or était la « combinaison de l'alkali fixe avec le soufre » On l'utilise au XV siècle contre la peste noire (désinfection des locaux). En 1781, l'élément chimique soufre fut détecté dans certaines plantes par N. Deyeux. En 1813, H.A. Vogel le détecte dans la bile et le sang d'animaux. Le soufre est effectivement présent dans deux des 20 amino-acides naturels. Puis ses propriétés fongicides sont signalées par William Forsyth en (1802) avant que les xanthates soient découverts (en 1822) par W.C. Zeise, qui prépare également le premier thiol, à l'époque appelé mercaptan, C2H5SH en 1831. La même année, le procédé de contact pour la préparation de SO3, donc de l'acide sulfurique, est breveté, utilisant comme catalyseur l'oxyde de vanadium V2O5. Le cluster S4N4 est préparé pour la première fois par M. Gregory à partir de S2Cl2 et NH3. En 1839, le procédé de vulcanisation du latex par le soufre est mis au point par Goodyear aux États-Unis. En 1845 à partir de l'Angleterre, une maladie émergente, l’oïdium de la vigne colonise le vignoble français puis européen où les vendanges de 1852 sont 5 fois inférieures à ce qu'elles étaient en 1847. Duchartre, Hardy et Grison montrent ou valident l'efficacité du soufre contre cette maladie. Gonthier invente un soufflet permettant de pulvériser de la fleur de soufre sur les feuilles de vignes mouillées puis en 1853 Rose Charmeux teste à Thomery le poudrage à sec qui se montre efficace. Il sera utilisé dans toute l'Europe permettant de redresser dès 1858 la production viticole. En 1880, on recommande 3 poudrages annuels, fastidieux et nécessitant 120 à 150 kg/ha/an de soufre trituré (ou 80 à 90 kg/ha/an de fleur de soufre). Cinq ans plus tard (1885), la bouillie bordelaise s'y ajoute pour traiter un nouvel envahisseur : le mildiou de la vigne. Les isotopes 33 et 34 sont identifiés par spectrométrie de masse grâce à F. W. Aston en 1926. En 1920, ce dernier n'avait détecté que l'isotope le plus abondant S. Depuis le XIX siècle, le blanchiment de la laine et de la soie, la chimie, la production d'acide sulfurique, de poudre à canon, d’allumettes, etc. ont généré une consommation croissante de soufre. À partir de la seconde moitié du XIX siècle, l'agriculture va également en absorber de grandes quantités, pour ses propriétés désinfectantes et fongicides (à la fin du XIX siècle, le vignoble en consomme à lui seul de 100 000 à 150 000 t/an) ou sous forme de sulfates (sulfate de potassium, d'ammonium et de magnésium) dans certains engrais. Il faut alors construire en urgence (à partir de 1856) des sublimeries et tritureries de soufre, usines où les incendies sont redoutés. On en trouvera des dizaines autour de villes comme Marseille, Montpellier, Frontignan, Sète, Narbonne, Bordeaux pour répondre aux besoins des vignerons. Cette industrie dope aussi le machinisme agricole, car l'application manuelle à grande échelle était source d'allergies et de brûlures des yeux pour les applicateurs. Ces besoins ont été cause d'une demande croissante en soufre qui a nourri une industrie spécifique. Mais alors que les demandes industrielles et agricoles augmentaient, une très grande quantité de soufre était produite par la désacidification de certains gaz naturels (à Lacq en France par exemple) puis par la production de carburants désoufrés (imposés par un nombre croissant de législation visant à faire diminuer la pollution de l'air et les pluies acides). Le soufre, en tant que produit naturel (Soufre trituré ventilé ou micronisé) est encore l'une des substances traditionnellement autorisées et utilisées en agriculture biologique et dans les jardins comme fongicide, acaricide et répulsif, bien que devant être utilisé modérément et prudemment sur certaines cultures ; Il est peu actif comme anticryptogame sous 18 °C, optimal à 23−25 °C, mais peut devenir phytotoxique au-delà de 35 °C selon la nature des formulations. De plus, il donne par exemple un goût soufré au vin ou au jus de raisin.